Que font-ils exactement, ces conseillers, formateurs, superviseurs, coachs et thérapeutes ? Sont-ils amis ? Frères ennemis ?
L’entreprise est un lieu où l’on devrait pouvoir « se faire du bien » quel que soit le rôle ou le statut… employé, manager, dirigeant.
Il est évident que les principaux défis actuels de l’entreprise ne sont plus d’ordre technique ou technologique, mais bien en lien avec les humains qui la constituent. Le développement du bien-être ne va donc plus se situer principalement sur l’amélioration des conditions matérielles de travail, mais bien sur la dynamique et les processus humains des organisations.
Dans l’entreprise portée, voire secouée, par les grands vents des changements en tout genre, chacun se sent responsable de « bien mener sa barque ». J’en vois qui décident de se débrouiller seuls, au risque de s’épuiser, de perdre courage et de se sentir dépassés. Le burn out les guette, surtout s’ils sont impliqués dans la réussite de leur mission et de l’entreprise. D’autres font monter à bord de leur embarcation des experts ; ils ont pour devise « si tu veux aller vite, marche seul, si tu veux aller loin marchons ensemble ». Ils sortent de l’isolement. Ayant franchi le cap de la décision de se faire accompagner, il leur faut également choisir, parmi l’offre proposée, l’expert qui convient.
Un conseiller ? Oui, si j’ai besoin d’avoir un diagnostic dans un domaine précis que je ne maitrise pas. Je recevrai des recommandations et des pistes à suivre. Je reçois des conseils mais je ne développe pas d’expertise.
J’ai un problème juridique, je choisis un avocat qui analyse ma demande, suivant ses compétences, et il me dit « quoi faire ».
Un formateur ? Oui, si j’ai besoin de développer des compétences dans une matière précise. J’acquière une expertise. Je choisis un expert – pédagogue qui est à même de transférer son savoir.
Je prends un premier poste de management et je n’ai pas appris à déléguer. Un formateur m’aidera à assimiler des concepts théoriques sur la fixation des objectifs et des techniques pour mener efficacement un entretien.
Un superviseur ? Oui, si je souhaite développer des compétences dans un métier dont j’ai déjà une bonne maîtrise. Je vais exposer des situations de ma pratique à un « sénior » de mon domaine. Celui-ci ne cherche pas à me donner des conseils. Il a pour objectif de m’aider à développer mon identité professionnelle, perfectionner mes outils, affiner mes connaissances. Souvent je progresse aussi grâce aux échanges avec des pairs.
Voilà trois ans que je suis formateur, je rencontre régulièrement la même problématique : je me laisse déborder par les demandes des participants et cela a pour conséquence que je ne respecte pas suffisamment les objectifs et le timing prévus. Je regarde cette situation sous l’angle de la théorie des groupes, je revois des techniques de cadrage en réunion et je prends conscience des besoins personnels qui me font accepter des demandes hors contrat.
Un coach ? Oui, si je veux avoir un espace où je peux réfléchir, prendre du recul par rapport à une situation professionnelle, avec un expert de la relation et du changement de cadre de référence.
Je suis responsable d’une équipe et je souhaite changer le fonctionnement relationnel des membres de celle-ci. En effet, Ils sont trop individualistes et je pense que la coopération est devenue incontournable pour relever les défis que la direction nous a fixés.
J’ai besoin d’un endroit où je peux réfléchir librement, en toute sécurité, à toutes les questions que je me pose. Et surtout ne pas réfléchir seul.
J’ai besoin d’envisager toute la complexité de la situation. Et de regarder là où, d’habitude, je ne porte pas mon attention.
Je ne veux pas de conseils. Je veux pouvoir m’appuyer sur mes compétences, mes savoirs faire, mes ressources tout en tenant compte de qui je suis.
Un thérapeute ?Oui, si je veux comprendre l’origine de comportements répétitifs qui me limitent, de sentiments qui parasitent mes relations et qui ne sont pas productifs bien au contraire. Oui, si je veux me dégager de croyances que je sais inutiles et héritées de mon éducation. Oui, si je veux entreprendre un voyage intérieur pour découvrir mon histoire personnelle, son influence positive et les freins que je me suis imposés.
Je ne cherche pas à résoudre rapidement une situation présente. Je m’en sers comme porte d’entrée pour aller à la rencontre de mon intimité. Et j’ai besoin de l’accompagnement d’un professionnel de la psychothérapie. Quelqu’un qui m’écoute et me guide sur le chemin de la découverte de moi dans toute sa complexité.
J’ai quarante ans, Je suis cadre de direction et pour la troisième fois je suis en conflit avec mon patron et pour la troisième fois je pense démissionner. Je suis furieuse et je quitte. C’est presque plus fort que moi. Je pressens que ce n’est pas le hasard. Et je veux comprendre les racines profondes de ce fonctionnement pour pouvoir m’en dégager. Je pressens bien que cela est lié à la relation d’autorité et que d’autres éléments très personnels sont concernés.
La question de la frontière entre le coaching et la thérapie m’est souvent posée.
Et j’aime y répondre par l’importance de mettre une barrière très nette entre ces deux types d’accompagnement. Même s’ils ont des éléments en commun, ils n’ont pas du tout la même visée, ni le même chemin.
Dans la démarche psychothérapeutique, la visée est « un travail sur soi ». En analyse transactionnelle on parlera de compréhension de ses décisions scénariques et de redécision. Pour réaliser ce grand chantier, la personne a besoin d’établir, avec son psy, une relation dans laquelle il n’y a aucun enjeu professionnel, familial, social. Elle s’adresse à un expert qui a des connaissances approfondies de la psychologie du développement, de la « pathologie ». Ce dernier a le savoir nécessaire pour établir un plan de traitement qui tient compte de la structure de la personnalité pour choisir ses interventions.
Dans la démarche de coaching, la personne veut traiter une situation bien présente, en faisant appel à ses ressources, tout en tenant compte de ce qu’elle perçoit comme des limites. Il n’y a aucun objectif de changement du fonctionnement psychique. En d’autres mots, pas de visée de redécision. C’est un chemin de mobilisation de ce qui est disponible chez la personne, à un moment donné. Elle a également une grande composante de créativité.
Pourquoi ces deux approches sont-elles parfois confondues ?
À part le désir du coach d’être thérapeute, l’origine du coaching peut expliquer cela.
Ce métier est né aux Etats Unis à une époque où la psychologie humaniste est en pleine expansion, avec des figures comme Carl Rogers, Fritz Perls, Éric Berne ….
La psychologie humaniste a une vision positive de l’être humain. C’est également un modèle de psychothérapie qui s’appuie sur l’hypothèse de la tendance innée de la personne à vouloir se réaliser, c’est-à-dire à mobiliser les forces de croissance psychologique et à développer son potentiel.
La démarche de coaching est imprégnée de cette vision positive du « client ». Il est parfois nommé « champion », capable de réussite, de relever des défis et de développer son potentiel. Beaucoup de coachs se sont formés avec des techniques issues de ces approches de la psychologie positive. Ils ont besoin de différencier ce qui appartient à la démarche de psychothérapie centrée sur l’individu de celle du coaching. Dans cette dernière la personne doit prendre en compte son contexte de travail, la dynamique de son organisation, la culture de son entreprise, les éléments déterminants de son environnement.
Au final, je pourrais caricaturer en disant : le coaching est pour le bien-être au travail…. La psychothérapie pour le bien être avec soi.
Marie-Thérèse Mertens– Caach, Formatrice et Superviseur TSTA (P)